Les Émotions : Nos Meilleurs et Pires Compagnons

Les émotions sont une réalité qui concerne aussi bien les humains que les animaux.

Elles constituent un ensemble de phénomènes psycho-physiologiques qui indiquent que nous sommes vivants. Chez l’Homme, elles se manifestent par des sensations à la fois merveilleuses et douloureuses, simples et complexes, créées par Allah.

Bien que nos émotions soient indispensables à notre survie et à notre motivation, elles peuvent aussi être à double tranchant.

Il est donc essentiel d’apprendre à les canaliser. Car si elles nous permettent d’accomplir de grandes choses lorsqu’elles sont guidées par la raison et la foi, elles peuvent également être à l’origine de catastrophes et d’injustices majeures.

Ainsi, si les émotions sont au cœur de nombreux de nos problèmes, elles en sont aussi la solution.

C’est pourquoi nous avons décidé de dédier un papier sur ce thème.

Cet article est rédigé en collaboration avec Victoire d’Ummapsy, l’une de nos référentes en psychologie clinique, médiatrice spécialisée en psychocriminologie et gestion des conflits.

Notre synthèse s’appuie sur les théories profanes et les découvertes actuelles au sujet des émotions à la lumière du Coran.

Vrai ou faux : "La femme est-elle plus émotive et moins violente que l'homme ?"

Répondre à cette question sans connaissances préalables peut sembler a la porté de tout le monde, mais en réalité cette théorie est truffée de clichés et de contre vérités.

En effet, une étude américaine publiée par le NIH a pu mettre en évidence que les processus émotionnels sont beaucoup plus complexes que ce que l’on pourrait penser et que par conséquant nous avons tendance à réduire les comportements à des idées reçues. 

Le traitement de l’émotion ne résume pas à des catégories simplistes et à une distribution de bons ou mauvais points.

Diverses études menées par des scientifiques de nationalités différentes ont pu mettre en évidence l’importance de démêler les étapes de ces processus émotionnels afin de saisir la réalité des différences ou points communs entre les hommes et les femmes et mettre fin aux fausses croyances.

Décortiquer la « réaction émotionnelle » n’était pas le seul but de ces recherches il s’agissait de comprendre comment l’émotion est régulée (canalisée puis contrôlée) sur le plan cognitif.

Du point de vue scientifique, cela a permis d’affiner les raisons qui expliquent pourquoi certaines personnes  ont plus de difficultés que d’autres à s’auto-réguler et à contenir leur émotions, puis leur comportement.

A noter, la plupart des études sont menées sur des échantillons de groupes d’individus plus ou moins importants dont la selection repose sur une population qui représente au mieux l’hypothèse que l’on cherche à démontrer.

Aussi, les exceptions au regard de la « norme » font partie de l’hypothèse étudiée. Il ne s’agit donc pas de s’identifier ou d’identifier une voisine ou un patron, mais de dégager une moyenne normative qui prévaut sur les exceptions qui ne changent rien aux règles établies.

Il en est ainsi de toutes les lois auxquelles Allah soumet toutes ses créatures sans exception, comme Il l’indique dans son Livre révélé. Seule la manière qui vise à faciliter la pratique de ces obligations sans en déformer les piliers est permise en fonction des particularités des musulmans, mais il serait vain de s’y soustraire.

Ces études ont pu démontrer qu’en réalité les hommes et les femmes ressentent les mêmes émotions avec la même intensité face à un même événement, situation ou dans une relation. 

La différence entre eux sur ce point serait davantage liée à leur capteurs nerveux (nocicepteurs), au tempérement ou caractère, à la culture (environnement) et à l’expérience de vie qu’au genre masculin/féminin. En gros cette différence multifactorielle ne varie pas en fonction du genre.

Pour simplifier : 

Un homme et une femme qui assistent tous deux à un accident de la route ou à un événement que l’on qualifie de « traumatique » seront sujets aux mêmes émotions avec la même intensité, et la réactivité à celle ci sera plus ou moins identique. 

Il est donc aujourd’hui prouvé que l’homme et la femme sont égaux face aux sollicitations émotionnelles et sentimentales.  

En résumé une femme n’est pas nécessairement plus triste ou plus euphorique en raison de sa nature de femme et un homme peut être aussi touché qu’une femme devant un sujet sensible. Ce qui met fin aux idées reçues sur ce point.

En revanche ce qui différencie les uns et les autres est la capacité à réguler ces émotions communes.

D’autres recherches ont révélé des différences biogénétiques plus ou moins importantes entre les genres qui indiquent que l”homme est programmé pour un traitement cognitif de leur émotions intenses plus rapide et plus efficace afin de se protéger des effets notoires de celles ci et de protéger le groupe dans des situations d’adversité. Mais avec le temps il apparait que le comportement afférent repose essentiellement sur des facteurs culturels et environnementaux qui ont dégradé ses fonctions naturelles.

Autrement dit, l’homme rationalise immédiatement ce qu’il ressent pour éviter de prendre des décisions inconsidérées et anticiper les conséquences à moyen/long terme. 

Ce processus est couramment appelé « prendre du recul ».

Cet automatisme, hérité d’Adam (alayhi salam), lui aurait permis de s’adapter avec diligence à l’urgence d’un nouvel environnement, plus insécurisant pour lui et son épouse, après leur expulsion du paradis. 

En revanche, les filles d’Ève (Hawwa) auraient hérité d’une capacité moindre à gérer les émotions, préférant se mettre en retrait sous la protection d’un ordre, bien que de nombreuses femmes possèdent également cette capacité d’abstraction. ( cf Hajar (Radhi ALlahou ‘anha) ).

Cette différence de gestion des émotions permet de centraliser les décisions majeures en les déléguant à celui qui a été choisi pour cette tâche. 

Si cet homme est “doué d’intelligence” (smart gifted) il sollicite l’avis et l’expertise des membres de son groupe, ses amis, sa famille, son équipe, sa conjointe voire même ses ennemis, là où il peut manquer d’informations et de compétences. C’est le principe de Shoura (consultation) qui prévaut pour mener à la paix durable dans toutes les sociétés.

De son côté, la femme doit mener un effort pour contre balancer cette difficulté à rationnaliser. Pour cela elle doit mener une bataille décisionnelle et s’imposer des pensées positives pour ne pas suréagir et affaiblir les émotions fortes qui sont en général mauvaises conseillères même si elles sont  justifiées. 

Ceci dans l’attente d’informations supplémentaires qui lui permettront de réorienter les émotions  qui conduisent à des pensées non constructives et des comportements inadaptés.

Malheureusement il arrive que ces pensées négatives qui découlent d’émotions fortes ne sont pas perçues comme telles, mais plutôt comme des alliées fiables que l’on nomme à tord “sensibilité” ou “empathie” si elle ne sont pas basées sur des informations vérifiées.

Hors, se laisser envahir par la colère, le chagrin ou l’angoisse n’aide pas à remettre en question nos connaissance sur certains sujets, nos propres limites intellectuelles et nos intentions qui ont permit de construire un nouveau système : la revanche du « girl power ».

Étudions le phénomène émotionnel sous le prisme de ce qu’Allah nous enseigne.

En tant que musulmans, croyants, nous acceptons et comprenons tous que chaque mécanisme dans l’univers, qu’il s’agisse de l’humain, de l’animal ou des forces de la nature, est le résultat de la volonté d’Allah.

Dans une Sagesse que l’esprit peine souvent à saisir, Allah a décidé de créer un système avec des fonctions différentes pour atteindre des objectifs que nous comprenons soit instinctivement par la fitra et nos fonctions naturelles, soit par l’observation, la réflexion, l’apprentissage et l’expérience.

Ainsi, ce qui peut sembler être un handicap ou un défaut chez la femme fait en réalité partie d’une mécanique parfaite, permettant à ce système de vie sur Terre, décidé par Allah, de fonctionner harmonieusement, malgré les tentatives de destruction voulues par Iblis – même si nous devons parfois traverser des désastres. 

C’est dans cette complémentarité homme/femme que réside l’objectif : atteindre et maintenir un équilibre qui permet de surmonter les problèmes et d’accepter, ensemble, leur mortalité.

Construire une famille, un groupe, une société qui s’alignent sur les composantes biologiques et physiologiques de la femme complétées par celles de l’homme, n’est pas un choix ; c’est une décision divine préétablie.

En effet, Allah a doté la femme d’une beauté parfaite, dans ses formes et ses gestes, à laquelle tout homme est réceptif : ce qui fait d’elle un être physiquement et cognitivement moins armé. 

Cela incite l’homme à être plus bienveillant envers elle, tout en bénéficiant de sa compagnie, de sa chaleur et de ses conseils avisés, qu’elle soit sa mère, sa tante, sa sœur, sa fille, son épouse ou une vieille servante fidèle. 

Ce qui n’est en rien incompatible avec le fait que de nombreuses femmes surpassent les hommes dans la foi et l’intelligence.

Quant à l’homme, Allah lui a accordé la force physique, l’endurance, ainsi qu’une capacité de régulation émotionnelle qui se traduit par un esprit pratique, des qualités de leadership et un sens de la justice qui voit plus loin que les intérêts à court terme. 

Ces compétences sont essentielles pour prendre en charge les activités sociales et matérielles stressantes, et pour prévenir tout désordre qui découlent d’intentions nuisibles ou d’excès émotionnels qui pourraient mettre en péril le collectif.

Ces liens sont renforcés par la patience et le pardon réciproques, qui ne tolèrent ni violence ni mensonge.

Sans une éducation fondée sur des valeurs d’intégrité, tout autant valorisées et appliquées par des non-musulmans, et sans la piété pour s’imposer des limites, cet équilibre est difficile à maintenir voire voué à disparaitre sur le long terme.

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Beaucoup de problèmes découlent de l’ignorance et d’une mauvaise information. 

Si on l’additionne à la posture d’opposition à l’ordre divin, notamment en ce qui concerne le devoir de se mettre sous la tutelle d’un homme et de s’y conformer, alors le chaos prendra le relai et tout le monde sera malheureux.

Aussi il est important d’en avoir conscience et d’accepter cet ordre des choses. Même si ces hommes sont  un père ou un frère négligents. 

Quant aux situations délicates qui demandent des aides extérieures, Allah n’est jamais inattentif à nos plaintes et à nos états.

Lorsque cet ordre est maltraité il ne l’est qu’en raison des passions que l’on masque par des paravents “intellectuels” qui permettent à trop de femmes de céder aux tourments de leur vanité, qu’elles partagent avec des hommes qui n’ont pas toujours les meilleures intentions.

Face à nos épreuves communes, il est dans l’intérêt des musulmans d’accepter de se remettre en question. Nos interactions au sein du foyer puis dans la société façonnent notre futur, qu’on le veuille ou non.

Sans cette introspection parfois douleureuse, la femme ne pourra participer à l’effort de réforme communautaire qui ouvre les portes du salut de nos âmes.

C’est ainsi qu’elle doit faire preuve d’ingéniosité et de vision lointaine pour se maintenir dans l’ordre divin, même lorsque les hommes désertent leurs responsabilités et le bon comportement, afin de ne pas sombrer avec eux.

Notre situation est d’autant plus regrettable qu’elle est nourrie par l’instrumentalisation et la mésinterprétation de la vie de nos mères croyantes, éloignée des preuves scientifiques et des finalités voulues par Allah et que nos ancêtres ont peu à peu abandonné après la révélation. 

À notre échelle, notre devoir est de proposer des modèles fiables.

Nous les puisons dans des chroniques précieuses qu’Allah nous offre dans Son livre, le Coran, et à travers la tradition de Son Messager (‘alayhi salat wa salam). Elles sont des guides infaillibles lorsque nous sommes perdues, livrées à nous mêmes.

Notre Seigneur, nous le savons, ne décide rien au hasard, ni pour nous mettre en peine. Tout est amour, miséricorde, éducation et aide de Sa part.

Cette aide nous la retrouvons dans trois exemples éloquents évoqués par ALlah dans le Coran et qui décrivent avec une réalité désarmante, les étapes émotionnelles de la femme lorsqu’elle est confrontée à des situations angoissantes ou qui touchent à sa fierté et qu’elle ne peut appréhender sans l’aide de son Seigneur et de sa foi. 

Allah intervient miraculeusement en faveur de quiconque s’humilie et place sa confiance en Lui.

Exemple 1 – Maryam : Une vierge célibataire qui deviendra mère sans passer par le mariage.

Exemple 2 – La mère de Moussa : Une mère célibataire.

Exemple 3 – La femme d’Al-Aziz : Mariée à un puissant gouverneur.

C’est à travers ces femmes dont la noblesse n’est plus à démontrer et à la lumière du Coran et de l’exégèse que nous allons développer concretement notre sujet.  

Notre objectif est de mettre en lien le processus de régulation émotionnelle avec les qualités humaines et morales qui ont permis l’intervention d’Allah auprès de ces femmes afin qu’elles surmontent ces épreuves  ou au contraire, qui ont conduit certaines à outrepasser les limites de la bonne conduite. 

  • 1- Maryam (عليها السلام)

Maryam est une femme pieuse. Au-delà de son statut de “fille de” et de future mère, elle est une jeune femme qui possède une piété dont le rôle est fondamental dans la régulation de ses émotions. 

Pour exemple, lorsqu’elle reçoit la visite de l’Ange messager Djibril, qui, ayant pris la forme d’un homme, lui annonce qu’elle a été choisie pour donner naissance à un prophète.

L’émotion qu’elle ressent en premier lieu est la peur. La présence d’un étranger dans sa chambre exigüe la plonge dans un état de stress et de défiance absolue en tant que femme chaste, vulnérable et dont le lignage remonte a Moussa (aleihi salam). 

Cependant, elle ne cède pas à la panique totale et son coeur lui inspire immédiatement d’invoquer Allah, de se rappeler à son Pouvoir. C’est grâce à un environnement pieux et à une vie habituée à l’invocation et à aimer la chasteté que ce reflexe lui est naturel.

Elle est immédiatement soutenue par Allah, à travers Djibril, qui, comprenant sa détresse va la rassurer.

Comme le rapporte Ibn Kathir dans son Tafsir, Djibril la secoure par des paroles rassurantes : 

« Ton Seigneur m’a envoyé auprès de toi pour que je te donne un fils vertueux. Rien de ce que tu crains et redoutes n’arrivera. Je suis envoyé par ton Seigneur pour te donner un garçon pur »

(Tafsir Ibn Kathir, sourate Maryam).

Cette annonce met Maryam dans un état d’affolement mêlé d’incompréhension et s’exclame : « Comment aurais-je un enfant, moi qui n’ai jamais été touchée par un homme et que la débauche n’a jamais tentée ? ».

Djibril lui répond que c’est une décision divine aussi inéluctable que la mort et il lui rappelle sa mission.

Ce passage nous enseigne qu’aussi noble et enracinée dans la certitude d’Allah que soit Maryam elle n’est qu’une femme au prise avec des émotions pénibles et bouleversantes qui pourraient lui nuire et la pousser à désespérer. 

Allah ne lui tient rigueur en rien, Il l’apaise avec ce qui nous fait du bien à tous : Il l’a rassure. 

C’est ce que toute femme attend de ses proches : être consolée et soutenue par ses amis, sa famille ou son conjoint.  Ce réconfort sécurisant lui permet en retour d’être ouverte aux conseils et de s’astreindre aux recommandations et aux rigueurs qui l’aideront à orienter sa vie de musulmane. 

Nous sommes tous éprouvés. Pour la femme, plus l’épreuve est rude et plus nous sommes faibles plus nous subissons l’influence des autres dans la prise de décisions. D’où l’importance majeure de bien évaluer qui on laisse entrer dans sa vie et dans le choix de notre environnement. 

  • La mère de Moussa (Moîse) (عليها السلام) -

La mère de notre Prophète Moussa (aleihi salam) et son peuple, les Bani Israïl, sont maltraités et retenus en otage en Égypte par la tyrannie d’un roi psychopathe et paranoïaque dont l’orgueil a dépassé la raison.

Un prêtre lui annonce un renversement par la main d’un messager issus des Bani Israïl. Et voilà qu’il décide de défier cette prédiction en ordonnant de tuer les nourrissons mâles des familles restées monothéistes.

La mère de Moussa veut sauver la vie de son enfant bien aimé des sbires de Pharaon. Allah lui inspire alors de le déposer sur les flots du Nil. S’ensuit un périple qui plonge la mère de Moussa dans un état de détresse d’une telle intensité qu’Allah utilise le terme « Fou’ad » (un cœur tourmenté) à la place de « Qalb » pour désigner ce qui agite son cœur.

Ibn Kathir dit à ce sujet :

« À cet instant, le cœur de la mère de Moïse faillit défaillir. Elle était sur le point de tout révéler. Mais Nous raffermîmes son cœur pour qu’elle soit parmi les croyantes. »

Allah, le Tout-Sachant, Observe et Sait que la mère de Moussa n’arrive pas ménager cette décision nécessaire au destin des Bani Israïl. Elle peine à maintenir la patience nécessaire pour contenir ses émotions et ses sentiments et est sur le point de tout divulguer. C’est alors qu’Allah lui inspire d’envoyer sa jeune enfant, la sœur de Moussa, en éclaireuse pour suivre le chemin du couffin sur les rives du Nil afin de raffermir son coeur et que sa patience puisse être nourrie par l’espoir.

On observe dans cette situation que la foi et la confiance en Allah sont mises à l’épreuve par des tempêtes et le déchirement que seule une mère peut ressentir. Sans la certitude en le Pouvoir d’Allah par l’invocation il devient difficile de s’abstenir d’agir face à l’angoisse et le chagrin, la colère ou le désir ardent de se faire justice soi-même. Non il n’est pas naturel de faire descendre la sakina absolue en claquant des doigts : seuls les psychopathes ne ressentent presque rien. Il faut apprendre à vivre avec et comprendre à quel point nous avons besoin d’Allah pour canaliser nos émotions vers ce qui est plus raisonnable. 

Sinon les mauvaises décisions, les paroles mal placées, voire la folie, prennent le dessus et nous conduisent au pire scénario.

Dans le cas de la mère de Moussa, Allah parle de la « vraie croyante ».

La patience s’est transformée en miracle, la récompense rapide pour s’être accrochée à sa foi en la promesse d’Allah : Moussa lui fut rendu. Allah dit : « Nous le rendîmes à sa mère pour que son œil se réjouisse, qu’elle ne s’affligeât point et pour qu’elle sache qu’en vérité, la promesse d’Allah est vraie. Mais la plupart des gens ne savent pas. »

Ibn Kathir explique :

« C’est Allah qui la guida et raffermit son âme. »

Cette guidance est un privilège que nous décidons d’entretenir au quotidien. Et tout comme pour Maryam, elle prépare et favorise la régulation émotionnelle, la modère vers ce qui nous appaise pour mieux endurer l’amertume de l’épreuve que tout humain répugne de vivre. C’est la condition non négociable pour pratiquer ce qui est plus proche de la justice, se comporter avec confiance en Allah pour ne pas se précipiter dans des controverses ou des règles douteuses qui viennent s’accorder avec nos passions.

En effet, l’âme de chacun est sujette à la ‘ajala (précipitation), à la tentation d’exiger une solution immédiate de la part d’Allah, que nous légitimons par la douleur et la victimisation.

Dans les deux situations, ces femmes éminentes ne savaient rien de la signification de ces supplices, qu’elles pouvaient considérer comme imméritées compte tenu de leur statut. 

Ce qu’il faut méditer de ces exemples c’est que quelque soit la rudesse de l’épreuve, les émotions et les sentiments aussi insupportables qu’ils paraissent ne sont pas des prétextes suffisants pour justifier des initiatives qui se passent de préalables à la justice et encore moins pour adopter des comportements et extirper des passe-droits contraires à ce qu’Allah a prescrit pour les croyants.

  • La femme d’Al Aziz – Zalikha

Al Aziz mentionné dans le livre d’Allah est un des gouverneurs de province d’Egypte qui employait le prophète Yussuf fils de Ya’cuub (aleihi salem), illustre pour sa beauté exceptionnelle et son don d’interprétation des rêves.

Dans cette situation, l’épouse d’Al Aziz comme toutes les femmes de son époque, est soumise à l’épreuve de la beauté ravageuse et le charisme qu’impose la lignée, la noblesse d’âme et l’esprit ingénieux de Yussuf.

Cette femme, qui a également tout les atouts qu’une femme puisse espérer – beauté, jeunesse, statut social, renommée et richesse – est déjà mariée. 

Al Aziz fait entrer Yusuf comme valet (esclave) dans sa demeure, en toute confiance et ne peut s’imaginer de ce que cela va engendrer.

A la vue de Yussuf, la passion s’empare toute entière de la femme d’Al Aziz. Son coeur brûle d’amour et elle ne veut refouler les émotions qui la saisissent. 

Allah dit d’ailleurs : « Elle avait pleinement succombé ». 

Cela sous entend qu’elle ne luttait pas bien qu’elle fusse mariée. Elle laisse le champs libre à ses désirs.

Elle se dresse face à lui, utilise les stratagèmes que les femmes déterminées savent déployer, ( pour information : la flatterie et la vulnérabilité sont les atouts les plus utilisés. ). Elle le sollicite par des avances qu’elle espère concrétiser. Yusuf n’est qu’un homme, il remarque bien son charme. Mais sa crainte d’Allah est plus inviolable ce qui rend l’épouse d’Al Aziz un peu moins désirable. Il la rejette alors avec force prêt à s’enfuir par peur de succomber, par dégoût de commettre l’ignominie et vivre le déshonneur. Il court vers la sortie : elle lui court après – il atteint la porte : elle lui arrache son qamis par le dos et voila que la porte s’ouvre sur Al Aziz.

« (..) et lui aussi était sur le point de succomber lorsqu’il se rappela les enseignements d’Allah. Ce souvenir l’arracha au mal et à la turpitude. Nous le lui suscitâmes car il était parmi nos serviteurs fidèles ».

Sourate Yusuf

Ibn Kathir explique : 

« Yusuf et la femme coururent à la porte : Yusuf pour fuir la femme et elle pour le rattraper. Elle le tint par la chemise et fut déchirée. Tous deux trouvèrent alors le maître de la maison à la porte. »

La présence fortuite d’Al Aziz ajoute à la détresse de la femme déjà touchée dans sa vanité. Confrontée à la peur d’être dévoilée auprès de son époux et blessée d’avoir été éconduite, les émotions de honte, d’angoisse et de rage se mélangent. Ils ne trouvent pas de foi pour les assujetir à la raison et dire la vérité ou du moins raconter une histoire qui pourrait tout deux les sauver. 

Désespérée d’avoir été surprise, aveuglée par la colère d’avoir été repoussée, elle ne peut réfréner ses émotions : elle fera un faux témoignage, alors que tout l’incrimine. 

Yussuf tente de se défendre, on fait venir un serviteur pour aider à trancher : la chemise est arrachée par derrière, la femme ment.

Al Aziz se fâche et annonce “la ruse des femmes est certes puissante”. 

Cependant il fait emprisonner Yussuf, surement à sa demande, mais surtout pour se soustraire à la honte publique de la compromission de son épouse. 

Cette dernière n’a aucune forteresse ni en la personne de son époux ni en elle-même pour se préserver de ses émotions négatives. Il en sera de même pour les femmes de son entourage qui colporteront la nouvelle et qui se tailleront les mains de ne pouvoir se contenir face à la beauté captivante de Yussuf.

Ibn Kathir explique : 

« Pour éluder sa responsabilité et ruser contre Joseph qui refusa de coucher avec elle, elle s’écria devant son mari: «Que mérite celui qui a voulu déshonorer ta famille, sinon d’être jeté en prison ou de subir une peine exemplaire ? ».

MORALITÉ

Pour conclure, l’enseignement à méditer afin de rester juste et reconnaissant envers ce qu’Allah nous a offert est que la blessure, la peur, la haine et le regret sont des émotions nécessaires mais destructrices si on ne les réfrènent pas correctement.

Ces sentiments poussent les hommes et les femmes à s’aveugler et à entretenir leur ignorance. L’impatience nous précipite vers des décisions qui, bien qu’elles semblent soulager ou protéger, finissent toujours par nuire à tous, tôt ou tard.

C’est dans ce sens qu’Allah a établi des règles concernant les témoignages, notamment celui de la femme qui doit être complété par celui d’un autre homme. Allah a doté chaque genre, chaque nation et à chaque tranche d’âge des facultés différentes dont personne ne peut se passer sous peine de détruire notre humanisme.

Il a également établi une hiérarchie parmi les femmes, tout comme parmi les hommes. 

Elles ne sont pas toutes au même niveau en termes de caractère, de noblesse, de qualités humaines, intellectuelles, ou de compétences pratiques.

Cependant, cette hiérarchie n’a pas pour but de nous mettre en compétition, elle garantit notre survie individuelle par la voie du collectif dans la complémentarité. Les créatures sont interdépendantes, c’est ce qui nous distingue du CRÉATEUR.

Ainsi, Allah nous différencie dans la foi et nous répond en fonction de nos intentions, de notre l’humilité et de notre confiance. 

Il est toujours présent pour la femme qui cherche à Lui obéir en acceptant d’être guidée par un homme — que ce soit son père, son frère, son oncle ou un leader qui, lui-même, soumet d’autres hommes à la justice et à l’équité en suivant les prescriptions divines.

Un patriarcat sain canalise mieux les émotions de la femme,  il fait preuve de plus de patience et oblige les   hommes qui peinent à considérer correctement leurs semblables à leur accorder l’attention la sécurité matérielle, sentimentale et intellectuelle dont nous avons tous besoin, hommes comme femmes.

Cela ne signifie pas que certaines femmes ne sont pas capables de réflexion et de sagesse, bien au contraire. Elles sont nombreuses à être plus courageuses, plus véridiques, plus intelligentes et stratèges que beaucoup d’hommes. 

Nos mères croyantes et les femmes du Prophète (paix et bénédictions sur lui) en sont un parfait exemple ; elles étaient éminemment pieuses, fines d’esprit, curieuses et sensées.

La femme possède une accuité plus performante que les hommes, qu’ils ne peuvent ignorer : elle est capable de planifier les besoins, de s’organiser, fait attention aux détails importants et sait traduire les comportements non verbaux et les émotions non exprimées des enfants et de leurs proches.

Revenir au modèle de la hiérachie collaborative assurerait la réforme commune face à des hommes qui, certes, rencontrent des difficultés à pratiquer certaines valeurs et vertus. 

Il nous incombe de les convaincre que, pour traverser cette vie sans souffrir inutilement, sans s’égarer, et surtout pour atteindre le paradis éternel, il en va de l’intérêt général de mettre nos capacités spéciales au service et sous la direction d’un homme musulman intègre, qui n’est pas parfait, mais que nous devons aider à s’améliorer.

Comment y parvenir ?

Il existe de nombreux moyens de mieux contrôler ses émotions et son comportement tant pour les femmes que pour les hommes ayant des problèmes de gestion de la colère ou d’anxiété. C’est ce que nous verrons ensemble dans la deuxième partie de notre série d’articles sur les émotions.

Source : Aseela.org